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S’agit-il seulement toujours de l’ironie, au sens où l’entend Jankélévitch : « Deux négations<br />

s’annulent, disent les grammaires : mais – ce que les grammaires ne nous disent pas –<br />

l’affirmation ainsi obtenue rend un tout autre son que celle qui s’installe du premier coup, sans<br />

passer par le purgatoire de l’anti<strong>thèse</strong> 1 » ?<br />

Il faudrait inventer un autre terme qu’ « ironie », un terme stipulant que l’ironie peut exister<br />

indépendamment de la reconnaissance de son statut via le contexte, peut exister, en somme, pour<br />

la seule personne qui la profère alors qu’elle est éminemment et intrinsèquement socialisée. Il<br />

faudrait forger un terme qui montre qu’un énoncé peut être ironique sans devoir se limiter pour<br />

s’affirmer tel (c’est-à-dire sans devoir nier ce qu’il semble être pour exister pleinement – pour<br />

faire exister son sens), si l’on développe, là encore, la formulation de Jankélévitch : « il faut que la<br />

pensée se limite pour exister 2 ».<br />

Ainsi, au sein de ce compte rendu, l’ironie, si elle reste toujours, « au sens propre du mot,<br />

une allégorie, […] car elle pense une chose et, à sa manière, en dit une autre 3 », n’est pas un<br />

« procédé négatif […] de la méthode socratique 4 », puisqu’elle est bien insoupçonnable, à la seule<br />

lecture du compte rendu, a contrario par exemple de ce passage du compte rendu que rédige Jarry<br />

du livre d’Henry Leyret intitulé Les Jugements du président Magnaud : « Félicitons M. Henry Leyret de<br />

l’excellent commentaire qu’il nous offre des célèbres jugements de Château-Thierry ; mais qu’il<br />

n’attribue qu’à notre impuissance d’y rien ajouter la liberté que nous allons prendre d’en tirer des<br />

conclusions toutes différentes des siennes. 5 »<br />

Ce dernier exemple d’ironie, en ce qui concerne le livre de Leyret, est d’autant plus<br />

intéressant qu’il se conforme en tout point, dans la dynamique qu’il porte en lui, au compte rendu<br />

de l’ouvrage de Dubois-Desaulle, Jarry imposant alors également sa propre lecture des faits, à la<br />

différence que dans le cas du compte rendu du livre qui nous occupe ici, Jarry impose avec plus<br />

de virulence et de force encore (il est extrêmement frappant de voir à quel point le texte<br />

spéculatif prend presque toute la place du compte rendu, le paragraphe conclusif se voulant<br />

critique apparaissant comme réduit au minimum et inévitable du fait de l’obligation qui est celle<br />

de Jarry de faire œuvre de critique), en tout point différent du propos originel, son propos.<br />

— Substituer invisiblement un sens à un autre.<br />

1<br />

Vladimir Jankélévitch, L’ironie, Flammarion, collection Champs, 1991, p. 76.<br />

2<br />

Id., p. 45.<br />

3<br />

Id., p. 42.<br />

4<br />

Cours Bergson, Cahier D, Ms 21133-B’-I-13 (5/6), Fonds Jacques Doucet, p. 91.<br />

5 OC II, p. 592.<br />

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