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Dans les exégèses sur les Minutes, l’on s’est interrogé sur la signification du terme « carcasse »<br />

rattaché à la présence de Raphaël. Et l’édition Bouquin de renvoyer au terme architectural,<br />

renvoyant également à Kevil qui « suppose que Jarry renvoie à une anecdote inconnue<br />

concernant Raphaël 1 », ce qui n’est nullement le cas.<br />

Il s’agit bien véritablement d’une œuvre supposée du peintre. Deux mots, « carcasse » et<br />

« Raphael [sic] », pouvaient suffire à éveiller (si cette œuvre attribuée à Raphaël n’est guère plus<br />

évoquée aujourd’hui, ce n’était sans doute pas le cas peut-on penser dans le cercle où évoluait<br />

Jarry) un cortège d’images très riches et très horrifiques qui vient ajouter au poème, au sein même<br />

de sa forme synthétique, une très longue description qui n’est autre que la description de l’œuvre<br />

attribuée à Raphaël.<br />

Ce qui est intéressant sont les modalités particulières de cette inscription réelle bien que non<br />

matérielle d’une réalité dans le champ propre du texte alors que cette réalité excède pourtant ce<br />

dernier, tout à la fois de par sa matérialité graphique et de par le monde qu’elle hallucine et que le<br />

texte ne saurait contenir : impossibilité duelle puisque le texte, du fait de la syn<strong>thèse</strong> avec laquelle<br />

il se confond, ne peut contenir la narrativité commuable en signe linguistique qui découle de la<br />

peinture de Raphaël et les éléments de sa picturalité eux irrévocablement étrangers à toute<br />

narrativité.<br />

En effet, cet ajout a lieu sans faire en sorte que la forme synthétique de la prose poétique soit<br />

démise, agrandie à ce qui n’est pas elle, mais au contraire en augmentant encore la syn<strong>thèse</strong><br />

suivant laquelle cette prose se construit. L’ajout apparaît certes dans la virtualité de son<br />

déploiement comme halo entourant la présence du texte jarryque tout en s’en tenant<br />

irrémédiablement éloigné, à jamais étranger – et cette éviction a ainsi valeur de proclamation du<br />

caractère synthétique du texte jarryque.<br />

Deux mots : « carcasse » et « Raphael [sic] », suffisent pour convoquer un monde. La<br />

description, quelle que soit sa longueur effective, est contenue dans ces deux mots car Jarry les<br />

utilise avec le pouvoir d’évocation qui y est rattaché, et même pour ce pouvoir. Il ne s’agit pas en<br />

effet ici pour l’auteur de César-Antechrist de faire acte d’affirmation d’un goût dans toute sa<br />

subtilité, en renvoyant à des références qui, de par leur impénétrabilité, témoigneraient de<br />

l’érudition autour de laquelle ce goût se construirait. C’est bien tout le contraire qui se produit.<br />

Les références valent uniquement, peut-on penser, en tant que miroirs réfléchissant<br />

immédiatement des réalités (plus ou moins, en fonction de chaque lecteur) précises. Aussi est-il<br />

très probable que cette œuvre de Raphaël ait été part du musée universel communément – parmi<br />

les lettrés férus de peinture – intériorisé. Quelle est précisément cette description-monde que<br />

1 Bouquin, p. 1253.<br />

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