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Et dans le numéro du 15 août de La Revue blanche, Michel Arnauld corrige implicitement mais<br />

vertement Jarry : « Pablo de Segovie n’est pas le prototype du roman picaresque. Trois quarts de<br />

siècle auparavant, Lazarillo de Tormes retraçait déjà le tableau de l’Espagne pouilleuse, et l’ironique<br />

philosophie des gueux. 1 »<br />

Jarry note, toujours dans « De Don Quichotte à Otero », au sujet de La Marquesita, « roman<br />

de mœurs espagnoles » de Jean-Louis Talon : « N’est-il pas sage de voir l’Espagne comme Méry<br />

vit l’Inde, en imagination, et la vraie Espagne n’est-elle pas celle des châteaux ? […] Un roman de<br />

mœurs espagnoles contemporaines, La Marquesita, nous restitue l’Espagne telle que nous osions à<br />

peine la souhaiter, et – heureuse surprise – telle qu’elle est, car on n’invente point de tels détails<br />

de terroir ».<br />

Et Michel Arnauld rebondit également sur ce point, énonçant implicitement une critique<br />

violente à l’encontre de Jarry : « On discutera pour savoir si l’Espagne de M. Talon est vraie ou<br />

fausse. Question parfaitement oiseuse […] 2 ».<br />

Ainsi, Arnauld réprimande durement le mauvais élève Jarry, mais d’invisible façon, même<br />

pour un lecteur attentif de La Revue blanche, car les allusions sont si fines, l’auteur du Surmâle et<br />

son œuvre n’étant jamais mentionnés, et aucun renvoi n’étant fait à l’article de Jarry, qu’il est très<br />

difficile d’établir la connexité entre l’article de Jarry et celui d’Arnauld.<br />

Aussi, si l’on peut penser que l’écriture du compte rendu d’Arnauld, de par son ton, et la<br />

récurrence des allusions, même très peu visibles, se construit d’abord en réponse à celui de Jarry,<br />

et en opposition à celui-ci, ce rejet n’a pour vocation que d’être visible pour Fénéon et Jarry, du<br />

moins en premier lieu – et, dans une moindre mesure, notamment pour les Natanson. Ce rejet<br />

fait sens et signe pour ce qui est de l’équipe rédactionnelle de La Revue blanche.<br />

Néanmoins, Jarry ne changera en rien sa méthodologie habituelle, et bien qu’un membre<br />

conséquent de l’équipe éditoriale de La Revue blanche ait émis visiblement de sérieux doutes sur la<br />

pertinence du propos critique de Jarry, et ainsi ait posé implicitement la question de la légitimité<br />

de sa continuation, Fénéon continuera à publier l’auteur d’« Haldernablou » avec constance, sans<br />

restriction semble-t-il, extrêmement attentif à sa liberté de ton, qu’il chérit.<br />

C’est pour cette raison, sans doute, qu’il a coiffé du titre « Les livres : Spéculations » cinq<br />

notes de lecture, dont quatre de Jarry, dans le numéro du 1 er janvier 1901 de La Revue blanche,<br />

saluant ainsi, à sa juste valeur, l’effectivité de la participation de Jarry à La Revue blanche en tant<br />

que collaborateur régulier, et désormais irremplaçable.<br />

1 Voir La Revue blanche, tome 28, mai-août 1902, p. 638.<br />

2 Id., p. 637.<br />

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