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sa parole érudite, – se déployant d’une part au sein de La Revue blanche qui a vocation d’érudition<br />

et d’autre part dans la partie critique qui est le fait sinon du savant, du moins des modalités<br />

particulières d’une parole savante jugée doxastiquement parfaitement au fait de la chose étudiée –,<br />

se trouve confortée dans son déploiement et ses assertions, quand bien même elle n’exprime le<br />

plus souvent, rappelons-le, qu’une érudition feinte.<br />

— Jarry joue au savant.<br />

Dans ce compte rendu plus peut-être qu’en aucun autre (du moins est-ce ici parfaitement<br />

perceptible ; voir également, notamment, son compte rendu de « Pierre Apéry : Communications au<br />

XIII e congrès international de médecine »), Jarry, s’il reste bien « un brillant représentant de la culture<br />

savante 1 » (bien que son intention soit également fortement de « donner audience au fleuve<br />

souterrain de la culture populaire 2 »), joue au savant, n’apportant aucune information qui soit le<br />

fait de son érudition propre, néanmoins bien présente (le baron Mollet va jusqu’à dire de Jarry :<br />

« [h]ormis Remy de Gourmont, je n’ai pas connu d’homme plus érudit que lui. Sa science était<br />

universelle et touchait à tous les domaines. Pour ses intimes, lorsqu’il se dévoilait, les instants<br />

étaient trop courts et on ne cessait de le questionner pour apprendre encore, car rien ne lui était<br />

inconnu 3 »), mais maquillant un discours émanant de Danville en sien propre, de telle sorte que<br />

l’auteur du Surmâle s’affirme suivant une érudition qui lui donne d’emblée, peut-on penser, toutes<br />

les caractéristiques du critique habilité à parler d’un tel ouvrage scientifique et ainsi légitimité dans<br />

sa démarche : la « nécessité de se distinguer », comme l’écrit Christophe Charle, y compris pour<br />

les critiques, « s’impose à mesure que le nombre de postulants à des positions dans ce champ<br />

augmente. 4 »<br />

Du reste cette posture de critique érudit qu’adopte ostensiblement Jarry n’est-elle pas<br />

circonscrite à sa seconde période littéraire se déployant notamment au sein de La Revue blanche<br />

puisqu’il l’adopte dès son compte rendu d’Âmes solitaires : « [...] les Âmes (conservons ce mot de<br />

Cohen plus philosophiquement explicatif et précisant que traduisant, malgré le titre du drame<br />

édité chez Fischer : Einsame Menschen) 5 ».<br />

1<br />

Henri Béhar, Les Cultures de Jarry, Presses universitaires de France, collection Écrivains, 1988, p.<br />

151.<br />

2<br />

Id., p. 119<br />

3<br />

Les Mémoires du Baron Mollet, préface de Raymond Queneau, précédé de « Les faits et gestes du<br />

Baron Mollet, pataphysicien » par Patrick Mauriès, Gallimard, Le Promeneur, 2008, p. 52.<br />

4<br />

Christophe Charle, Naissance des « intellectuels », 1880-1900, Les éditions de Minuit, collection Le<br />

sens commun, 1990, p. 38.<br />

5 OC I, p. 1004.<br />

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