30.06.2013 Views

thèse

thèse

thèse

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Néanmoins, « [d]ans un article sur le « Journalisme de poètes 1 », Michel Décaudin s’interroge<br />

sur « la notion d’activité journalistique appliquée à un poète ». Dissociant la participation à une<br />

revue littéraire comme mode de diffusion parallèle au livre du journalisme professionnel, il définit<br />

ce dernier comme « un engagement entre les parties, voire un contrat, définissant une périodicité<br />

(fût-elle souple), un mode de rétribution et un contenu (souvent en relation avec l’actualité) ». Il<br />

conclut de ces critères, qui s’appliqueraient tout aussi bien à Gourmont, que Jarry est journaliste<br />

dans ses chroniques commencées dans La Revue blanche et poursuivies dans diverses revues 2 » (il<br />

l’est bien évidemment également, au vu de ces critères, et à un plus haut degré encore, dans ses<br />

comptes rendus).<br />

Toutefois, Jarry a toujours « conservé sa liberté dans le journalisme, sans « prostituer sa<br />

plume », par une vigilance constante. En témoignent ses collaborations avortées, rompues<br />

brutalement, à La Renaissance latine à la fin de 1902, au Figaro en 1904 : mouvement d’humeur<br />

peut-être, mais surtout refus de se rendre acceptable, de se soumettre ou risquer de se renier, ce qui<br />

lui permet d’échapper aux contradictions où Mirbeau (comme bien d’autres) se prit : collaborer à<br />

une presse « pourrie » et en tirer ses revenus. Le prix à payer pour Jarry fut, évidemment, la<br />

misère. 3 »<br />

Ainsi, la mort de La Plume suit de peu celle de La Revue blanche, laissant Jarry sans revenus<br />

réguliers, situation tragique qu’il cherche peu avant à anticiper en se tournant vers La Renaissance<br />

Latine, une revue qui lui propose le prix qu’il demande pour ses chroniques en échange du<br />

principe d’exclusivité. Mais le projet capote. Deux chroniques seulement paraissent. La troisième<br />

fait tiquer le Prince commanditaire du journal, faisant s’insurger Jarry contre le fait qu’on puisse<br />

restreindre cette entière liberté à laquelle il a toujours été épidermiquement attaché, et que seuls<br />

ces lieux que sont (pour l’essentiel) La Revue blanche et Le Mercure de France ont pu lui offrir, lieux<br />

où les jeunes littérateurs comme lui ont ressenti le mieux l’intimité d’un groupe qui leur a été<br />

favorable et ont pu développer leur propre intimité à travers le flux de l’écriture 4 .<br />

« Dans un monde éditorial en pleine crise, liée aux impératifs d’une économie de marché et<br />

aux modifications profondes des attentes du public, les petites revues apparaissent à la fois<br />

comme un espace de résistance commune face aux impératifs commerciaux et comme des<br />

1<br />

Voir Michel Décaudin, L’écrivain-journaliste, Littératures contemporaines, n° 6, Klincksieck, 1998,<br />

p. 46-47.<br />

2<br />

Alexia Kalantzis, « De la dissociation à la Pataphysique : lumières d’Alfred Jarry et de Remy de<br />

Gourmont sur les choses du temps », L’Etoile-Absinthe, tournées 111-112, Société des amis<br />

d’Alfred Jarry, 2006, p. 12.<br />

3<br />

BESNIER, p. 444.<br />

4<br />

Voir Matthieu Gosztola, « Les petites revues : un espace de liberté pour Alfred Jarry », Les<br />

Nouveaux Cahiers de la Comédie-Française, « Alfred Jarry », La Comédie-Française / L’avant-scène<br />

théâtre, 2009, p. 32-37.<br />

97

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!