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même qui écrit à Alfred Vallette le 4 mars 1894, ainsi que nous l’avons déjà plusieurs fois<br />

rapporté : « Quel est pourtant le poète jeune qui ne rêve d’écrire un jour au Mercure ? 1 »<br />

Si l’élément pictural est loin d’être absent de l’œuvre de l’auteur de Premières lueurs sur la colline 2 ,<br />

l’on peut dire que la lecture que fait Jarry des textes de Paul Fort irrigue l’écriture des poèmes<br />

adressés à Munthe, même si Plusieurs choses se tient finalement assez éloigné de la tonalité de<br />

contes de fées que Jarry déploie au sein des « Tapisseries » (en accord avec l’intentionnalité<br />

première de Munthe) et qu’il reconnaît pourtant chez Fort.<br />

En effet, si les tapisseries (picturalité transmuée en poème ou présente factuellement)<br />

évoquées par Fort dans sa dédicace ont vraiment existé de la main de Hirsch, il n’apparaît pas que<br />

l’auteur de Plusieurs choses s’en soit inspiré, dans la façon qu’il a de déployer son propre tissu<br />

poétique au sein de « L’œuvre anonyme », mais c’est pourtant ce que Jarry cherche à retenir de<br />

l’ouvrage, écoutant les résonances que celui-ci plonge en lui et qui ont trait aussi bien à la crudité<br />

des couleurs des tapisseries qu’à l’univers des contes de fée, tonalités qui ne sont pas sans<br />

rappeler celles dont il va doter consubstantiellement les trois poèmes dédiés à Munthe. Ainsi<br />

résume-t-il notamment le propos de Paul Fort en ces termes : « Y passent des chevauchées de<br />

contes de fées sur le sommeil d’un monstre très beau, très meurtrier 3 ».<br />

Ce « monstre » n’est pas sans rappeler fortement celui présent au sein de l’aquarelle de<br />

Munthe intitulée La Peur des ténèbres que Jarry assimilera au silence, et les « chevauchées de contes<br />

de fées » peuvent renvoyer au bestiaire grâce auquel Jarry rend le second poème encore un peu<br />

plus habité d’une tonalité onirique et populaire.<br />

Par l’utilisation même, rare dans son œuvre, de l’expression « contes de fées », Jarry cherche<br />

en outre à signaler autant qu’à signifier la façon dont la critique qu’il rédige de l’ouvrage de Paul<br />

1 Id., p. 1036.<br />

2 Voir Henri Béhar, op. cit., p. 126 ; Noël Arnaud, op. cit., p. 124. Paul Fort fait part à Jarry pour<br />

L’Ymagier de « « bois » cochinchinois extrêmement curieux et inédits [...] – il y a : ornements, un<br />

guerrier terrible, un chat » » (Ibid.), bois que Jarry retiendra et qui lui permettront d’illustrer son<br />

étude poétique sur « Les Monstres » parue dans le second numéro de la revue en janvier 1895<br />

(voir OC I, p. 969-974). Jarry lui-même était, comme on sait, très attentif à l’élément pictural en<br />

tant que tel, intérêt qu’il ne faisait pas que partager avec Fort mais qu’il développait de concert<br />

avec lui dans une même unité non pas seulement de la pensée (se construisant au fil du dialogue<br />

et de la correspondance) ou de l’intérêt conjoint intériorisé (pour l’œuvre voisine et émanant du<br />

Même qui est l’altérité transmuée ainsi par le biais de l’amitié) mais également de la factualité.<br />

Ainsi, comme l’a démontré Henri Bordillon, il est extrêmement probable que Jarry ait contribué à<br />

illustrer, comme a pu le rapporter Paul Fort lui-même dans ses mémoires avec imprécision, une<br />

mince plaquette de 16 pages de la main de Fort publiée en 1896 sous le titre Louis XI, curieux<br />

homme, imprimée « avec les caractères du Pérhindérion (sic) », que ce soit une partie ou bien la<br />

totalité des trois bois ornant cet ouvrage.<br />

3 OC I, p. 1008.<br />

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