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hors intérieurs bourgeois qui cherchent alors, sinon à recomposer communément l’atmosphère<br />

chinoise ou japonaise, du moins à s’accaparer quelque chose de cette atmosphère – le flou est alors<br />

d’usage, comme le sous-entend Jarry à plusieurs reprises au sein de L’Amour en visites :<br />

« […] jusqu’en Chine […] voici justement des potiches du Japon 1 » ; « […] chinoiseries du<br />

Japon 2 » – à grand renfort de « japonaiseries » : potiches, tapis, paravents… et qui donnent la<br />

possibilité à la frontière (car l’ailleurs matérialisé ramené dans un cadre européen manifeste une<br />

brisure, un déplacement, rend sensible une frontière en s’exprimant justement en opposition à ce<br />

cadre, et ainsi en rendant sensible cette opposition) d’être présente dans un intérieur ; mais même<br />

si l’intérieur semble alors halluciner un extérieur sans se refuser au principe de confort, lorsqu’il<br />

se déploie suivant la mode orientale avec une certaine exubérance, comme c’est parfois le cas,<br />

tâchant de recomposer, ce faisant, une totalité, la plupart du temps, quelques bibelots seulement<br />

servent de points saillants de décoration, posés sur des meubles – Jarry donne écho à cette<br />

conception bourgeoise de l’ameublement dans l’évocation qu’il fait des potiches au sein de<br />

L’Amour en visites 3 et du Surmâle 4 –, et font alors figure de vestiges de voyages, de souvenirs qui,<br />

plus que de renvoyer à une réalité géographique autre, renvoient au périple singulier de celui ou<br />

celle qui les a ramenés en France.<br />

Et font naître invariablement la fascination, auprès de ceux qui s’affirment volontiers<br />

spectateurs de ces formes de reliques et ont été écartés du voyage, que cet écart naisse de leur<br />

volonté ou non, puisque « l’époque fut tout entière marquée par l’exotisme et par le goût pour<br />

l’ailleurs qui traversèrent les pratiques sociales et artistiques. 5 »<br />

Le bibelot devient le signe de la traversée, l’objet qui garde trace de l’exploit individuel à quoi<br />

se résume, encore, un voyage au long cours : « Baedeker, / Robert Macaire ! / Au Vatican, la<br />

collection des Antiques / Est la premièr’ du monde et la plus authentique… / Elle n’est pas<br />

encore commencée. / La plus grande partie en sera dispersée, / En petits souv’nirs pour touristes<br />

étrangers 6 », écrit Jarry dans Le Moutardier du pape.<br />

Dans Le Manoir enchanté, il note : « [O]n rapporte à la famille, / Aux p’tits enfants, aux<br />

grands-papas, / Des bib’lots avec l’estampille : / Petits souvenirs de là-bas ! / On est allé voir<br />

1 OC I, p. 851.<br />

2 Id., p. 857.<br />

3 Voir OC I, p. 851.<br />

4 Voir OC II, p. 254.<br />

5 Anne Décoret-Ahiha, « « Ce n’est pas du tout cambodgien mais c’est délicieux », Les danses<br />

cambodgiennes de Cléo de Mérode à l’exposition de 1900 ou la tentation de l’exotisme en<br />

danse », Dir. Guy Ducrey, Jean-Marc Moura, op. cit., p. 48.<br />

6 OC III, p. 183.<br />

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